Mme Asma Jahangir, qui a été rapporteuse de 2004 à 2010, a présenté un rapport sur la France en 2005 dans lequel elle constatait l'existence de « certaines zones d’ombre » dans la politique française anti-sectes, une politique qui aurait « provoqué des situations où le droit à la liberté de religion ou de conviction de membres de (certains groupes religieux ou communautés de conviction) a été indûment restreint ».

Nous avons écrit à M. Bielefeldt pour porter à sa connaissance des épisodes concrets de discrimination à l'encontre de personnes végétariennes en France qui constituent des atteintes à leur liberté de conviction. Il s'agit de témoignages d'individus végétariens et végétaliens* ayant été discriminés, sur la simple base de leur régime alimentaire, dans des situations diverses : chez le médecin, à la PMI, devant la justice ou encore à la maternité.

Notre plainte est accompagnée de documents qui corroborent le fait que les régimes végétariens sont régulièrement diffamés et criminalisés par des structures publiques ou par des agents du service public. Ce sont des documents officiels, tels le Plan National Nutrition Santé (PNNS) qui véhicule des informations systématiquement négatives quant à la viabilité du végétarisme et du végétalisme, ou encore le rapport 2009 de la MIVILUDES (Mission Interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires), dans lequel les régimes végétariens sont associés à la notion de « dérive sectaire » sans qu'aucun lien ne soit ne soit démontré.

Par ailleurs, les affirmations du PNNS, étant entièrement contradictoires avec l'évaluation positive des régimes végétariens attribuée par le milieu scientifique international**, constituent une violation du droit à la santé, qui prévoit un engagement de la part des États à « s'abstenir (...) de censurer, retenir ou déformer intentionnellement des informations relatives à la santé »***.

En présentant au rapporteur spécial les obstacles que les individus végétariens vivant en France rencontrent dans leur vie quotidienne, nous voulons mettre en valeur le fait que la liberté de conviction est malmenée dans ce pays en ce qui concerne les opinions exprimées au sujet de l'alimentation végétarienne. En particulier, empêcher les personnes végétariennes et végétaliennes de pratiquer sereinement leur choix revient à attaquer leur positionnement non violent vis-à-vis des animaux et à entraver le débat sur la question éthique du traitement des animaux dans la société française.

Pour plus de détails, voir la page Plainte à l'ONU.

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* Il y a différents types de régimes végétariens : en particulier, le végétarisme, qui exclut la chair animale (viande, poisson), et le végétalisme, qui exclut aussi les autres produits d'origine animale (laitages, œufs). Ce dernier est une pratique alimentaire qui obtient les nutriments nécessaires au bon fonctionnement de l'organisme dans les produits non animaux (y compris la vitamine B12, d'origine bactérienne et prise en complément).

** Voir notamment la position de l'American Dietetic Association, selon laquelle « les alimentations végétariennes (y compris végétaliennes) bien conçues sont bonnes pour la santé, adéquates sur le plan nutritionnel et peuvent être bénéfiques pour la prévention et le traitement de certaines maladies. Les alimentations végétariennes bien conçues sont appropriées à tous les âges de la vie, y compris pendant la grossesse, l'allaitement, la petite enfance, l'enfance et l'adolescence, ainsi que pour les sportifs ».

*** Paragraphe 34 du Commentaire général n. 14 du Comité des droits économiques, sociaux et culturels.